LE DOMAINE DE LA MAGIE
Le recours aux guérisseurs
Chez nous, c’étaient des personnes qui faisaient cela de temps en temps, avec le désir de rendre service, dans le cercle restreint du voisinage. Elles le faisaient de bonne foi sans objectif mercantile. Elles faisaient disparaître les douleurs cutanées comme l’érésipèle ou des brûlures, d’une façon quasi instantanée. C’est ce don qu’avait Sylvain Cauquil de La Capte. Il faisait aussi disparaître les verrues.
Denis Oulès : « Ma sóre arrestava lo fuóc. » Ma sœur arrêtait les inflammations.
Ernest Molinier soigne les brûlures, les zonas. D’abord sceptique sur son propre pouvoir à partir de ce qu’on lui avait enseigné, il se rend compte que les gens sont satisfaits de ses services, comme ceux qui viennent le voir pour les brûlures consécutives à un traitement par des rayons.
(Thérèse Pistre) A Cabrié, Lo Perral m’a fait disparaître très vite mes verrues.
(Une ancienne habitante de Carlebou) Une belle jeune fille était complexée car sa main gauche était couverte de verrues. Elle avait tout fait pour les faire disparaître, de l’acide, du jus de chélidoine, même les remèdes de rebouteux. On lui indique le guérisseur du village. Elle prend rendez-vous. Le jour fixé, le guérisseur demande à la jeune fille d’aller au jardin d’à côté et de ramener un poireau. Le guérisseur le coupe en deux dans le sens de la longueur et l’applique sur la main en forme de croix. Assez sceptique, elle sourit. « Il faut essayer d’y croire ! » lui dit l’homme et il fit plusieurs signes de croix, murmura une prière. « Voilà, le temps fera le nécessaire ! » Pendant quelques jours, la jeune fille surveille sa main de très près. Rien ne se passe. Les verrues sont toujours là. Elle ne regarde plus sa main et un jour, surprise ! Sa main gauche est aussi nette que l’autre ; sans aucune cicatrice. Emerveillée, elle court remercier le guérisseur qui n’est pas étonné. Bien d’autres sont venus ainsi lui manifester leur reconnaissance.
(Robert Calas) Vers l’âge de 15 ans, j’avais les mains « claoufies » de verrues, cela me gênait physiquement et esthétiquement ; je voyais certaines personnes qui hésitaient à me serrer la main. Les médicaments classiques n’y faisaient rien: verulyses et autres « poutingues« . J’avais même tenté de les brûler à l’acide chlorhydrique, mal m’en prit et m’en cuit !
J’étais aller voir le guérisseur local, Mouret de Villelongue, qui m’avait fait la « patufa« . Rien à faire. Un jour, un pêcheur venu de Castres me regarda les mains. Sans mot dire, il prit quelques œufs de saumon, appât (illicite) dont il se servait pour attirer les truites, et les écrasa sur toutes mes verrues. Il me recommanda de ne pas me laver les mains de sitôt. Quelques jours après, en me réveillant je constatai, avec grand soulagement, que tous mes « agacins » avaient totalement disparu…

Pour soigner un érésipèle (c’est une dermo-hypodermite aiguë non nécrosante qui provoque des démangeaisons) 
 (Marie Rols, grand-mère de Francine Panis) La brûler, tout le tour avec un fer chaud et la piquer avec une baleine de parapluie chaude. Frictionner avec un oignon et de l’alcool à brûler.
Faire tomber de l’argent soit d’une bague ou d’une pièce de 20 sous dans un peu de trois-six et avec la bague ou la pièce faire le tour du petit bouton où l’érésipèle commence.

LA BAVE DU CHIEN 
(Denis Oulès) Ma mère était à Gandilhou et un vieux avait une plaie ouverte. Le médecin a conseillé de faire lécher la plaie par un chien. Et en effet…

LES REBOUTEUX LOS REBOTAIRES
(Enric de la Lauza) Mon frère s’était estropié une cheville, en sautant un mur, à la chasse. Je suis allé chercher à Narulle Joseph Pistre, qui nous a portés dans sa 2 CV camionnette aux Germanes afin de rencontrer un rebouteux. Celui-ci fit le diagnostic que la cheville était déboîtée et que l’os de dessus était légèrement fêlé.
Il nous demanda de tenir mon frère, pendant qu’il prit le pied de ses deux mains, il tira dessus puis à droite et à gauche. Il posa le pied par terre : « Voilà, c’est fini, tout est en place ! » « Me damne, que m’as fach mal ! » (Que tu m’as fait mal) répondit mon frère. La dame de la maison fit boire un petit verre et une bande fut posée autour du pied. « Quand vous serez à la maison, faites des bains d’amidon, deux fois par jour. Après chaque bain, remettez la bande. Surtout de huit jours, ne posez pas le pied par terre. Après, vous marcherez comme avant. » Et effectivement, quinze jours après, mon frère vaquait à ses occupations.
(Denis Oulès) Une fois, je m’étais tordu le cou et je souffrais l’enfer, sans pouvoir bouger la tête. On m’a emmené chez une dame Séguier de Lacaune, en souffrant le martyre dans la voiture qui m’a transporté. Là elle m’a fait asseoir et m’a emponhat per la borra (m’a pris par les cheveux). Et en fin de compte, elle a tout remis en place, je ne sentais plus rien.
Cette personne a aussi remis en place le bras d’Ernest Molinier.
(Jean Séguier) Cette Albanie Séguier était ma tante. Elle tenait le secret d’une sœur de ma grand-mère, Mathilde Valette, qui était une sacrée personnalité. Elle habitait rue de la Mairie et son mari était maçon. Quand celui-ci et ses ouvriers refaisaient le toit de l’église de Lamontélarié, elle partait à pied pour trois bonnes heures leur porter le repas de midi et pour ne pas perdre de temps, elle tricotait une chaussette à l’aller et une autre au retour !

LE PAL POUR SE DÉFENDRE

(Ernest Molinier) Au grenier, j’ai trouvé un pal tout cussouné de mon grand-père. C’était un gourdin, d’un mètre environ, en chêne ou en houx. Il avait, en bas, la grosseur d’un manche, et était effilé vers le haut, où un trou permettait d’enfiler un lacet en cuir et ainsi de manier le pal avec plus de sûreté. Le Plo des pals, au-dessus de Lacaune, tirerait son nom d’un combat entre deux clans.
 
DES REMÈDES INATTENDUS AVEC LA VIPÈRE ET LE FIEL DU COCHON 
(Marcel Cauquil) Notre région a deux sortes de vipères, l’aspic, brun rouge, et la vipère péliade, plus noire et plus grosse. Quand on tuait une vipère, il fallait y couper la tête et la queue, car il paraît que celle-ci contient aussi du venin. On incisait la peau vers le centre et on tirait fortement de chaque côté. Il ne restait plus que la carcasse qui, après avoir été salée, était suspendue à un clou d’une poutre de la salle commune. Je l’ai vu faire à ma mère et à Gineste de Villelongue. Quand on avait de la fièvre ou d’autres ennuis, on coupait deux ou trois centimètres de vipère, on les faisait bouillir et on buvait ce breuvage, qui, paraît-il, faisait transpirer abondamment. 
(Enric de la Lauza) Le fiel de la vésicule biliaire de cochon mâle, était employé pour soigner les plaies infectées. Comme pour les serpents, il n’était pas rare d’en avoir suspendu aux clous des poutres. Lorsqu’on avait un piquant de buisson ou un corps étranger, il était rare qu’une seule application de fiel n’arrive pas à le faire sortir. En fait le fiel ramollissait les chairs et il était plus facile d’enlever les échardes.

Categories: Le blog

Laisser un commentaire

En savoir plus sur La gazette des amoureux des monts de lacaune

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading